Christina Buttons, autiste et journaliste indépendante : Substack.com, 24 mars 2023
Article original : How Autistic Traits Can Be Mistaken For Gender Dysphoria
Traduction par Magali Pignard.
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De nombreuses filles autistes ne sont pas diagnostiquées avant l’âge adulte, ce qui peut entraîner d’importants problèmes de santé mentale et des diagnostics précoces erronés.
Les enfants et les adolescents autistes sont représentés de manière disproportionnée au sein de l’importante et nouvelle cohorte de jeunes qui s’identifient comme transgenres.
Ces dernières années, le nombre d’adolescents et de jeunes adultes adoptant une identité transgenre a augmenté de façon exponentielle, suscitant un débat intense sur les causes sous-jacentes de ce phénomène. Le discours dominant sur cette question s’est concentré sur des facteurs tels que l’influence sociale, une plus grande acceptation sociétale et l’élargissement des définitions de ce que signifie être transgenre.
Cependant, un facteur important mais largement inexploré qui pourrait contribuer à cette tendance est l’autisme non diagnostiqué, en particulier chez les jeunes filles. Sans diagnostic, et même avec un diagnostic mais sans une compréhension claire de la manière dont les traits autistiques peuvent se présenter, ces traits peuvent être facilement confondus avec la dysphorie de genre et amener les individus à poursuivre des interventions médicales inappropriées et irréversibles.
Les troubles du spectre autistique (TSA) sont des troubles neuro-développementaux complexes qui affectent la communication, l’interaction sociale et le comportement et dont la gravité varie d’un individu à l’autre. Cependant, malgré son histoire et sa prévalence, ce trouble reste très mal compris, en particulier chez les filles.
Pendant la puberté, les filles autistes sont souvent confrontées à des difficultés sociales et sensorielles exacerbées en raison des changements hormonaux qui affectent leur corps et leur cerveau. Ces difficultés peuvent être aggravées par la pression qu’elles subissent pour faire face à des situations sociales et à des attentes qui ne leur sont pas familières, ce qui peut entraîner le développement de troubles concomitants tels que la dépression, l’anxiété et les problèmes d’image corporelle. Malheureusement, la difficulté de communiquer leurs expériences peut amener les professionnels de la santé mentale à négliger leur autisme sous-jacent.
Lorsque j’ai découvert les histoires des détransitionneurs, dont beaucoup ont également compris qu’ils étaient autistes après leur mésaventure, j’ai ressenti un lien fort avec eux, ce qui m’a motivée à devenir journaliste et à m’intéresser à leurs histoires.
J’ai eu des contacts avec beaucoup de ces jeunes hommes et femmes qui s’identifiaient auparavant comme transgenres […]. La prévalence de l’autisme parmi eux et la façon dont ces traits ont pu jouer un rôle central dans leur parcours de transition sont trop importantes pour être ignorées.
Bien que mes observations sur cette cohorte ne soient ni exhaustives ni concluantes, je pense qu’elles apportent néanmoins un éclairage indispensable sur cette population peu étudiée. Ces observations sont issues de mes conversations avec 48 détransitionneurs et de leurs témoignages écrits.
Sur les 48 détransitionneurs avec lesquels j’ai été en contact, 42 (32 femmes et 10 hommes) sont autistes confirmés ou suspectés de l’être (identification de traits autistiques). Bien que les 6 autres soient convaincus de ne pas être autistes, ils pensent que leur dysphorie de genre perçue est due à une variété d’autres raisons, y compris d’autres troubles psychiatriques.
Parmi les 42 détransitionneurs dont l’autisme est confirmé ou suspecté, seuls 5 ont été diagnostiqués avant ou pendant leur transition. Tous les cinq m’ont dit que s’ils avaient pleinement compris ce qu’impliquait l’autisme et comment il pouvait se manifester dans leur vie, ils n’auraient probablement pas cru qu’ils souffraient de dysphorie de genre. Ils ont également déclaré que l’« identité de genre » et les questions liées au transgenre étaient devenues leur « intérêt spécifique » pendant un certain temps.
Cette observation a également été faite par le Dr Kenneth Zucker, un psychologue qui dirige depuis 30 ans la plus grande clinique canadienne spécialisée dans les questions de genre chez les enfants, et qui pense que de nombreux adolescents autistes s’identifient comme transgenres en raison de leur tendance à se fixer ou à être obsédés par un « intérêt particulier ».
Quant aux 37 détransitionneurs restants, environ la moitié d’entre eux ont obtenu un diagnostic officiel après leur détransition et ont déclaré qu’un diagnostic d’autisme antérieur aurait pu les empêcher de recourir à des services de transition médicale, ce qu’ils regrettent aujourd’hui. Certains détransitionneurs ont écrit sur ces révélations.
L’autre moitié est soit en train de chercher une évaluation diagnostique, soit n’est pas intéressée, mais a découvert qu’elle s’identifiait à des traits autistiques. Parmi les raisons pour lesquelles ils ne cherchent pas activement à obtenir une évaluation, on peut citer les longs délais d’attente et un scepticisme général à l’égard des professionnels de la santé mentale qui n’ont pas réussi à les évaluer correctement par le passé.
La détransition des jeunes est en augmentation. […] Beaucoup estiment aujourd’hui qu’ils ont subi un préjudice médical en raison de leurs diverses interventions chimiques et chirurgicales.
L’un des moyens d’atténuer ces conséquences serait d’améliorer la sensibilisation sur l’autisme, en particulier sur la façon dont il se manifeste chez les filles, et de plaider en faveur d’un diagnostic précoce. Il ne s’agit pas de diminuer les expériences des adultes transgenres sur le spectre, mais plutôt d’écarter les faux positifs. Un diagnostic précoce de l’autisme pourrait empêcher certains de confondre l’autisme avec la dysphorie de genre.
Outre le dépistage précoce de l’autisme, le modèle de soins affirmatifs utilisé par de nombreuses organisations médicales américaines présente un risque important pour les personnes autistes vulnérables qui peuvent s’auto-diagnostiquer comme ayant une dysphorie de genre et rechercher des interventions médicales irréversibles pour soulager leur détresse.
Le modèle d’affirmation du genre qui a été largement adopté aux États-Unis empêche les professionnels de la santé de remettre en question l’identité transgenre déclarée par une personne ou d’explorer les facteurs sous-jacents possibles à l’origine de la dysphorie perçue. […]
Le modèle de soins affirmatif a été abandonné en Floride et dans des pays européens progressistes comme la Finlande, la Suède, le Royaume-Uni et, plus récemment, la Norvège, après avoir procédé à des examens systématiques des données disponibles et conclu que les risques de la transition médicale pédiatrique l’emportaient de loin sur les avantages supposés. Ces conclusions ont conduit à la fermeture d’importantes cliniques spécialisées dans les questions de genre, à des restrictions strictes sur l’utilisation d’hormones de sexe opposé et à l’interdiction des opérations chirurgicales liées au genre pour les mineurs. Les instances médicales d’Italie, d’Australie et d’Espagne ont récemment exprimé des préoccupations similaires.
Si les organisations médicales américaines étaient prêtes à revenir sur le modèle de soins affirmatif et à donner la priorité à des évaluations approfondies, réfléchies et individualisées qui explorent les raisons pour lesquelles une personne peut ressentir de la détresse par rapport à son sexe, elles pourraient éviter les diagnostics erronés et les traitements inappropriés.
Il est important de comprendre comment les traits autistiques peuvent être confondus avec la dysphorie de genre et mal diagnostiqués. J’ai donc dressé une liste pour aider à cette compréhension.
Traits de l’autisme pouvant être confondus avec la dysphorie de genre
Les personnes autistes sont confrontées à un certain nombre de difficultés qui s’intensifient lorsqu’elles ne bénéficient pas d’un diagnostic approprié ou qu’elles ne sont pas suffisamment informées sur la manière dont leurs caractéristiques peuvent se manifester. Parmi les caractéristiques qui peuvent conduire à une confusion sur leur « genre », on peut citer les problèmes d’identité, la rigidité ou la pensée « noir et blanc », les intérêts intenses et restreints, les comportements non conformes au genre, les difficultés sociales et la préférence pour la socialisation en ligne, l’incongruité avec le corps, et d’autres comorbidités.
Identité
À l’adolescence, les autistes ont généralement l’intuition qu’ils sont différents de leurs pairs, mais ils sont incapables d’en préciser ou d’en décrire la raison, ce qui peut être angoissant. Alors qu’ils luttent pour s’assimiler, ils peuvent se préoccuper de se comprendre eux-mêmes et de savoir comment ils s’intègrent à leur entourage. Dans une tentative désespérée de résoudre leur détresse, ils peuvent « essayer » différentes identités ou diagnostics pour voir ce qui leur convient.
Pensée rigide
L’une des principales caractéristiques de l’autisme est la rigidité de la pensée, un style cognitif qui se caractérise par des schémas de pensée, des comportements et des routines rigides et répétitifs.
- Ces dernières années, l’importance de la dysphorie de genre en tant que diagnostic significatif a été réduite au profit d’une définition plus large de ce que signifie être transgenre, ou « diversifié en termes de genre », qui inclut la simple non-conformité aux stéréotypes fondés sur le sexe. Les personnes autistes pourraient facilement interpréter cette définition comme signifiant qu’elles sont transgenres.
- Les personnes autistes peuvent préférer les explications simples et être enclines à penser noir ou blanc. Lorsqu’elles rencontrent des points de vue trop simplistes sur le genre, cela peut leur fournir une explication rapide de leurs problèmes (elles sont transgenres) et une solution toute faite (transition) pour atteindre ce qu’elles espèrent être un sentiment de normalité et de confort dans leur corps.
- Parfois, les filles qui ne se conforment pas au genre ont l’impression de ne pas pouvoir rivaliser avec les filles qu’elles perçoivent comme plus féminines, plus populaires et plus attirantes. Comme les filles autistes peuvent facilement s’enfermer dans une pensée noire et blanche, cela peut les amener à rejeter la féminité et à embrasser la masculinité.
- Les personnes autistes ont une aversion pour l’inauthenticité. Une fois qu’elles ont été initiées au concept d’ « identité de genre », elles peuvent réexaminer l’histoire de leur vie sous cet angle, à la recherche de signes indiquant qu’elles pourraient être transgenres. Par un processus de biais de confirmation, ils peuvent trouver des traits et des événements de vie qui se conforment à un récit transgenre.
- Les personnes autistes ont des difficultés à penser de manière flexible et sont moins susceptibles de changer d’avis une fois qu’ils sont convaincus de la véracité d’une chose. Elles peuvent être profondément attachées à leurs croyances et avoir du mal à envisager d’autres solutions. Si elles sont convaincues d’être transgenres, elles s’accrocheront à cette conviction [qu’elle s’avère exacte ou non].
- Les personnes autistes ont également tendance à être très littérales et lorsqu’elles rencontrent des déclarations censées être figuratives et promouvoir l’inclusion, comme « les femmes trans sont des femmes » et « les hommes trans sont des hommes », elles risquent de les prendre au pied de la lettre. Elles peuvent en venir à croire qu’elles peuvent réellement changer de sexe.
- Leur naïveté peut également se manifester dans leurs attentes en matière de transition sociale et médicale, et elles peuvent devenir extrêmement frustrées si leurs attentes ne sont pas satisfaites.
- Leur tendance à la rigidité de pensée peut rendre difficile l’adaptation aux changements de normes ou d’attentes en matière de genre. Cette rigidité peut être interprétée à tort comme une forte identification à un sexe et une gêne vis-à-vis d’un autre.
Intérêts intenses et restreints
L’une des caractéristiques de l’autisme est l’intérêt intense et obsessionnel pour certains sujets ou passe-temps, également connus sous le nom d’ « intérêts spécifiques ». Les intérêts spécifiques sont une caractéristique commune des TSA et peuvent devenir des passions dévorantes, qui procurent aux individus un sentiment de confort, de plaisir et de maîtrise.
La recherche suggère qu’il peut y avoir des différences entre les sexes dans les types d’intérêts particuliers que les garçons et les filles autistes développent. Par exemple, une étude a montré que les filles autistes étaient plus susceptibles de s’intéresser aux personnes et aux animaux, tandis que les garçons autistes étaient plus susceptibles de s’intéresser aux objets et aux systèmes.
Il est tout à fait possible que les personnes TSA, en particulier les femmes, s’intéressent de près à la justice sociale et aux questions relatives aux transgenres. Elles peuvent devenir obsédées par l’exploration et la compréhension de l’« identité de genre », y compris leur propre expérience et celle d’autres personnes « de genre différent ». Cet intérêt peut se traduire par des lectures et des recherches sur l’identité de genre, par la participation à des groupes de soutien ou à des événements de défense, par des expressions créatives en ligne ou par l’adhésion à des communautés en ligne.
- Les personnes autistes ont un sens aigu de la justice et de l’équité, et peuvent s’intéresser aux sujets de « justice sociale » qu’elles rencontrent dans les communautés en ligne sur les médias sociaux.
- Les personnes autistes peuvent être fascinées par la communauté transgenre et son importance culturelle, avec ses nombreux influenceurs transgenres charismatiques et sa fréquente actualité. Avec la popularité croissante de la communauté transgenre, il existe une infinité de façons d’interagir concernant cet intérêt spécifique.
- L’idéologie de l’ « identité de genre » est issue d’une théorie sociale postmoderne développée dans les départements de sciences humaines des universités, appelée « Queer Theory », qui a fait l’objet d’un grand nombre d’écrits et de conférences. Elle peut fournir des heures d’apprentissage sans fin à toute personne intéressée par le sujet.
- Les termes « constant, persistant, insistant » sont utilisés par les prestataires de soins médicaux pour indiquer qu’une personne souffre de dysphorie de genre, mais ils pourraient facilement décrire la relation d’une personne autiste avec son centre d’intérêt.
Non-conformité au genre
Historiquement, les personnes autistes sont plus susceptibles de présenter un comportement sexuel atypique. Il ne faut pas décourager les jeunes d’adopter un comportement non conforme au genre. Il est tout à fait naturel et normal qu’une fille ait des traits et des intérêts plus stéréotypés masculins et qu’un garçon ait des traits et des intérêts plus stéréotypés féminins — cela n’équivaut pas à une dysphorie de genre.
- Une étude de 2014 a révélé que les enfants atteints de TSA étaient 7,5 fois plus susceptibles d’être non conformes au genre ou d’ « exprimer une variance de genre ».
- Une étude réalisée en 2021 a révélé que la non-conformité au genre est nettement plus élevée dans la population autiste.
- Plusieurs études ont suggéré que les troubles du spectre autistique (TSA) et la non-conformité au genre coïncident plus souvent que par hasard chez les adolescents.
- La sexualité semble également plus variée chez les personnes autistes que chez celles qui ne sont pas atteintes de cette maladie. Seuls 30 % des autistes interrogés dans le cadre d’une étude réalisée en 2018 se sont déclarés hétérosexuels, contre 70 % des participants neurotypiques. Et bien que la moitié des 247 femmes autistes interrogées dans le cadre d’une étude réalisée en 2020 se soient identifiées comme « cisgenres », seules 8 % d’entre elles ont déclaré être exclusivement hétérosexuelles.
- En raison de l’élargissement de la définition de la notion de transgenre, désormais définie par les principales institutions comme un « terme générique » qui englobe la simple non-conformité au genre, les personnes autistes pourraient croire que, parce qu’elles ne se conforment pas aux stéréotypes fondés sur le sexe, elles pourraient être transgenres.
- Les personnes autistes peuvent être socialement attirées par le sexe opposé. Elles peuvent trouver qu’il est plus facile de communiquer avec les personnes de sexe opposé et qu’elles ont plus de points communs avec elles. Cela peut les amener à croire qu’elles sont en fait, ou devraient devenir, de sexe opposé.
Difficultés sociales
Le genre est souvent présenté comme une « construction sociale », et l’un des traits caractéristiques de l’autisme est une foule de défis sociaux. La difficulté à s’adapter aux « rôles de genre » peut contribuer de manière significative au rejet du « rôle de genre » perçu, ce qui peut conduire à un rejet de leur sexe biologique par extension.
- Difficultés de communication sociale : les personnes autistes peuvent avoir des difficultés à communiquer socialement et à comprendre les signaux sociaux, ce qui peut rendre difficile la compréhension des normes et des attentes en matière de genre. Ces expériences peuvent être frustrantes et les amener à rejeter les normes associées à leur sexe.
- Comportements répétitifs : les personnes autistes peuvent avoir des comportements répétitifs, qui peuvent parfois être interprétés à tort comme des comportements sexuellement typiques. Pour les filles, les mouvements répétitifs ou perturbateurs peuvent être considérés comme non féminins et entraîner un rejet social de la part des groupes de pairs.
- Difficultés d’imagination sociale : les personnes autistes peuvent avoir des difficultés d’imagination sociale, ce qui peut les empêcher de s’imaginer dans différents rôles ou identités. Cette difficulté peut être interprétée à tort comme un manque d’identification à son sexe biologique.
- Difficulté à prendre du recul : les personnes autistes peuvent avoir des difficultés à comprendre le point de vue des autres ou les attentes sociales, ce qui peut rendre difficile l’interprétation des rôles et des attentes des hommes et des femmes.
- Difficultés de régulation émotionnelle : les personnes autistes peuvent avoir des difficultés à réguler leurs émotions, ce qui peut entraîner des réactions émotionnelles intenses et pénibles face à certaines situations ou attentes sociales liées aux rôles des hommes et des femmes.
- Les personnes autistes apprennent souvent à adopter d’autres personnalités pour s’adapter et se fondre dans différents environnements sociaux, ce qui peut leur permettre d’adopter plus facilement une identité transsexuelle.
Préférence pour la socialisation en ligne
Les personnes autistes ont plus de difficultés avec les relations sociales « dans la vraie vie », ce qui les amène à préférer la socialisation en ligne, qui peut être plus facile et moins stressante pour elles. L’une des raisons est que les interactions en ligne peuvent donner un sentiment de contrôle et de prévisibilité qui peut faire défaut dans les interactions en face-à-face.
Les personnes autistes peuvent trouver plus facile de communiquer en ligne parce qu’elles ont plus de temps pour traiter les messages et y répondre. Elles peuvent également éviter les communications non verbales qu’elles ont du mal à interpréter. En outre, la communication en ligne peut être moins épuisante et moins stimulante sur le plan sensoriel que la communication en personne.
Une autre raison est que les interactions en ligne peuvent permettre d’entrer en contact avec d’autres personnes qui partagent des intérêts ou des expériences similaires, ce qui peut être plus difficile à trouver en personne.
Actuellement, il y a une forte convergence entre la communauté des autistes en ligne et la « justice sociale ».
- Les autistes comprennent difficilement les comportements sociaux et peuvent être enclins à imiter ce qu’ils voient en ligne. Les algorithmes des médias sociaux peuvent les alimenter d’un flux constant de contenus provenant de la communauté transgenre en ligne, ce qui peut les amener à croire que c’est ainsi qu’ils sont « censés » agir pour s’intégrer.
- Ils peuvent découvrir un influenceur transgenre qui est apprécié pour sa « réussite sociale » et essayer d’imiter son comportement, ses vêtements, son langage corporel et ses centres d’intérêt pour s’assimiler. Ils peuvent vouloir créer du « contenu » comme d’autres influenceurs transgenres.
- Les personnes autistes aiment généralement les règles, car elles leur donnent un sentiment de structure et de prévisibilité. Elles peuvent apprécier que les règles sociales appliquées par les communautés de justice sociale en ligne soient explicitement clarifiées dans des infographies Instagram partageables.
- Certaines personnes autistes ont un talent particulier pour les compétences visuo-spatiales, ce qui peut les amener à s’intéresser à des domaines créatifs tels que l’art ou le design, tandis que d’autres sont créatives en musique ou en écriture. Les autistes créatifs peuvent être influencés par les « expressions de genre » qu’ils voient en ligne, notamment en inventant leurs propres « néo-pronoms ». Ils peuvent vouloir exprimer leur propre créativité à travers leur compréhension du « genre ».
- De nombreuses personnes autistes se sentent socialement maladroites, ont des difficultés à se faire des amis et se sentent seules. La population croissante de la communauté transgenre, qui embrasse les personnes différentes, peut sembler accueillante et un réseau intégré d’amis et de soutien peut être attrayant.
- Dans le monde en ligne, les gens sont encouragés à créer leur « marque ». Ils peuvent vouloir trouver une personnalité en ligne dans une communauté de niche.
- Ils peuvent être influencés par d’autres pour rejeter les personnes de leur vie qui ne les « acceptent » pas, rejoindre des « mères à paillettes» ou ne plus avoir de contact avec leur vraie famille. Avec moins de personnes hors ligne pour les maintenir en contact avec la réalité et leur fournir des points de vue différents, ils risquent de succomber davantage aux communautés en ligne agissant comme une caisse de résonance.
Incongruité avec le corps (déconnexion et inconfort)
Les autistes ont du mal avec l’intéroception (détection des signaux internes de votre corps). Elles peuvent reconnaître qu’elles se sentent mal à l’aise, mais elles ont du mal à interpréter leurs signaux corporels et à en déterminer l’origine. Ce problème est aggravé par l’alexithymie (incapacité à identifier et à décrire les émotions). En l’absence d’un diagnostic approprié, cette situation peut contribuer à un sentiment d’incongruité avec son corps.
Les autistes, surtout s’ils n’ont pas été diagnostiqués, peuvent facilement être submergés par les stimuli sensoriels, mais n’ont pas toujours les mots pour exprimer ce qui les met mal à l’aise. Une gêne permanente dans son corps peut être attribuée à tort à une dysphorie de genre.
- Les personnes autistes peuvent présenter une sensibilité sensorielle tactique, ce qui peut les mettre mal à l’aise lorsqu’elles portent certains types de vêtements ou d’accessoires associés à leur sexe biologique.
- Par exemple, les filles du spectre peuvent préférer des vêtements plus typiques des garçons parce qu’ils sont amples et plus confortables. Elles peuvent penser à tort que ces vêtements sont plus « masculins ».
- Pour les adolescentes en particulier, le fait de ne pas adhérer à la dernière mode de leurs pairs peut leur donner l’impression d’être exclues.
- Les personnes autistes peuvent également éprouver des problèmes sensoriels pour faire leur toilette, ce qui peut rendre difficile le respect des normes et des attentes en matière de genre.
- Les filles peuvent se sentir mal à l’aise lorsqu’elles se maquillent.
- Les filles peuvent préférer garder leurs cheveux courts ou en queue-de-cheval tous les jours parce que les laisser tomber irrite leur peau.
- Les jeunes garçons peuvent vouloir se laisser pousser les cheveux longs parce qu’ils détestent aller chez le coiffeur.
- Les autistes ont souvent des problèmes de proprioception, qui peuvent se manifester par des difficultés à situer leur corps dans l’espace. Cela peut entraîner des problèmes de coordination, d’équilibre et de motricité fine, qui peuvent conduire à des sentiments de frustration ou de déconnexion par rapport à leur corps physique.
- Les adolescents dont le corps se développe et qui n’ont pas l’impression de correspondre aux idéaux stéréotypés de leur sexe peuvent rejeter leur corps et se focaliser sur les défauts qu’ils perçoivent, ce qui entraîne des troubles de l’image corporelle.
- Pour les adolescents, les discussions sur la dysphorie de genre en classe peuvent être la première fois que le « malaise du corps » leur est présenté et articulé, ce à quoi ils peuvent s’identifier et commencer à associer leur propre malaise corporel à la dysphorie de genre.
- La succession des étapes de la transition sociale puis de la transition médicale peut leur donner l’impression d’être sur la voie de se sentir enfin « bien » dans leur corps.
Comorbitités
Les personnes autistes, en particulier celles qui n’ont pas été diagnostiquées, sont plus susceptibles de souffrir de troubles mentaux concomitants, tels que l’anxiété ou la dépression, ce qui peut compliquer l’évaluation de la dysphorie de genre.
Dépression
Les autistes ont des difficultés sociales qui les empêchent de nouer et d’entretenir des amitiés, ce qui conduit à l’isolement et à la dépression, et cet effet est aggravé lorsque le diagnostic d’autisme n’est posé qu’à l’âge adulte.
- Une étude réalisée en 2022 a révélé que les personnes diagnostiquées autistes à l’âge adulte sont presque trois fois plus susceptibles que leurs homologues diagnostiqués dans l’enfance de déclarer souffrir de troubles psychiatriques.
- Une étude réalisée en 2021 montre que le fait de recevoir un diagnostic d’autisme à l’âge adulte plutôt que dans l’enfance peut entraîner une baisse de la qualité de vie, des symptômes de santé mentale plus graves et des niveaux de traits autistiques plus élevés.
Idées suicidaires
De plus en plus de recherches ont montré que les jeunes et les adultes autistes semblent présenter des taux plus élevés de pensées, de projets ou de comportements suicidaires que les jeunes non autistes.
- Une méta-analyse a montré qu’un jeune autiste sur quatre a des idées suicidaires et que près d’un sur dix fait une tentative de suicide.
- Une étude danoise a révélé que les autistes présentaient des taux trois fois plus élevés de tentatives de suicide et de suicides.
- Une étude britannique réalisée en 2022 a révélé qu’un nombre important de personnes décédées par suicide étaient probablement autistes, mais n’avaient pas été diagnostiquées.
Troubles obsessionnels compulsifs
Les personnes autistes sont plus sujettes aux troubles obsessionnels compulsifs et peuvent être obsédées par leur désir de devenir le sexe opposé pour échapper à leur mal-être.
- Une étude a révélé que 17 % des autistes pouvaient souffrir de TOC.
- Selon une étude réalisée en 2017, une proportion encore plus importante de personnes souffrant de TOC pourrait également être atteinte d’autisme non diagnostiqué.
- Il pourrait être utile de considérer la dysphorie de genre comme une forme de TOC, dans laquelle l’individu attribue son sexe biologique comme une source de détresse et est obsédé par le désir de devenir le sexe opposé. Par ailleurs, certaines cliniques spécialisées dans les TOC ont tenté de faire la distinction entre la dysphorie de genre et ce qu’elles ont appelé le « TOC trans», qui est une « obsession de l’identité de genre ».
Troubles de l’image corporelle
Les personnes autistes sont plus susceptibles d’avoir des problèmes d’image corporelle qui peuvent les amener à faire une fixation sur leur poids (troubles alimentaires tels que l’anorexie ou la boulimie) ou sur les défauts qu’elles perçoivent (dysmorphie corporelle).
- Environ 20 % des personnes souffrant d’anorexie sont autistes.
- La dysmorphie corporelle est un trouble dans lequel une personne fait une fixation sur des défauts perçus sur le corps qui deviennent exagérés dans l’esprit. Elle fait partie d’une nouvelle catégorie de « troubles obsessionnels compulsifs et apparentés » dans laquelle les personnes autistes sont surreprésentées.
Anxiété
L’anxiété est une affection concomitante fréquente chez les personnes autistes.
- La recherche suggère que jusqu’à 40-50 % des personnes autistes peuvent présenter des symptômes d’anxiété cliniquement significatifs à un moment ou à un autre de leur vie.
- Une étude a révélé que jusqu’à 84 % des personnes autistes souffrent d’une certaine forme d’anxiété.
Troubles gastro-intestinaux
Les troubles gastro-intestinaux (GI) sont l’une des pathologies les plus fréquemment associées aux troubles du spectre autistique (TSA). Ces troubles peuvent contribuer à l’inconfort et à l’incongruité du corps.
- Selon certaines études, jusqu’à 90 % des personnes autistes présenteraient des symptômes gastro-intestinaux, tels que des douleurs abdominales, de la constipation, de la diarrhée et du reflux.
- Une méta-analyse complète a révélé que les enfants atteints de TSA étaient quatre fois plus susceptibles de développer des troubles gastro-intestinaux que les autres.
Syndrome des ovaires polykystiques (SOPK)
Des recherches indiquent un lien entre le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) et l’autisme. Le SOPK est une maladie hormonale qui implique des interactions complexes entre les ovaires, les androgènes, d’autres hormones et l’insuline. L’une des principales caractéristiques de cette maladie est l’augmentation des niveaux d’androgènes ou « hormones mâles ». L’augmentation du taux d’androgènes, associée à la virilisation, peut être une source de détresse considérable pour plusieurs femmes et entraîner une forme de dysphorie de genre.
- Une étude a révélé que les femmes autistes au Royaume-Uni ont un risque presque deux fois plus élevé de souffrir du SOPK.
- Une étude de 2012 a révélé que les femmes atteintes de SOPK ont des problèmes d’identification psychologique du genre. La durée et la gravité du SOPK peuvent avoir un impact négatif sur l’image de soi des patientes, conduire à une identification perturbée avec le schéma du genre féminin et, associé à cela, les rôles sociaux.
Traumatisme
Si une personne autiste vit une expérience traumatisante, elle est plus susceptible de l’intérioriser. Si elle est victime d’abus sexuels, elle peut développer des associations négatives avec la partie de son anatomie qui a été maltraitée et ressentir le besoin de la rejeter.
- Les filles autistes courent un risque accru d’abus sexuel.
- Des recherches ont montré que les personnes autistes ayant subi des abus sexuels sont plus susceptibles de présenter des symptômes d’intériorisation tels que la dépression, l’anxiété et le syndrome de stress post-traumatique (SSPT) que les personnes non autistes ayant subi des abus sexuels.
- Cela peut s’expliquer par le fait que les personnes autistes peuvent avoir des difficultés à communiquer leurs expériences et leurs sentiments à propos des abus, ce qui peut entraîner un sentiment d’isolement et d’impuissance.
- Les personnes autistes peuvent également avoir du mal à traiter et à réguler leurs émotions, ce qui peut rendre plus difficile la gestion du traumatisme de l’abus sexuel.
Autres facteurs contributifs
- La pandémie: lorsque les cliniques de soins non urgents ont été fermées, de nombreux jeunes se sont retrouvés socialement isolés et déprimés, se tournant vers les communautés de santé mentale en ligne et s’autodiagnostiquant. C’est ce qui s’est produit avec l’émergence des « tics TikTok » et la résurgence du trouble dissociatif de l’identité (TDI), autrefois extrêmement rare.
- La puberté : la puberté est une période de changements importants dans le corps et le cerveau, qui peuvent affecter les personnes autistes de différentes manières. Au cours de cette période, elles peuvent voir leur santé mentale se dégrader, ressentir un malaise corporel et éprouver des difficultés sociales. En l’absence de diagnostic, les adolescents autistes peuvent ne pas comprendre pourquoi elles éprouvent ces difficultés et se sentir isolés et désorientés.
- Les événements stressants de la vie : les événements stressants de la vie peuvent être particulièrement difficiles pour les personnes autistes en raison de leurs difficultés à faire face aux changements, aux incertitudes et à l’imprévisibilité. Les personnes autistes peuvent avoir du mal à gérer les changements de routine, les événements inattendus et les situations qui exigent de la flexibilité et de l’adaptabilité.
- Perte du diagnostic du syndrome d’Asperger : le diagnostic du syndrome d’Asperger a été fusionné en un diagnostic général appelé trouble du spectre autistique (TSA) dans la mise à jour du DSM-V en 2013, ce qui peut contribuer à l’absence de diagnostic chez les personnes qui semblent présenter des symptômes moins visibles. La population en général associe l’autisme à un handicap grave, et les personnes ne présentant pas de déficience intellectuelle sont moins susceptibles d’être diagnostiquées.
- Mauvais diagnostic : la difficulté des autistes à réguler leurs émotions et les problèmes qu’ils rencontrent dans leurs relations peuvent être mal interprétés et sont souvent diagnostiqués à tort comme des troubles de la personnalité borderline, des troubles bipolaires, etc.